Livingstone dit qu’Hitler a été sioniste ; son collègue le traite d’ "apologiste nazi"

Déclenchant un énorme conflit dans un parti déjà profondément embourbé dans des accusations d’antisémitisme, l’ancien maire travailliste de Londres, Ken Livingstone, a affirmé jeudi qu’Adolf Hitler avait d’abord été un partisan du sionisme « avant qu’il ne devienne fou et finisse par tuer 6 millions de Juifs » et a continué en disant que pendant des décennies au Royaume-Uni, il y avait eu une « campagne bien orchestrée par le lobby israélien pour qualifier toute personne critiquant la politique d’Israël d’antisémite ».

L’ancien maire de Londres Ken Livingstone a été suspendu jeudi du Parti travailliste pour avoir dit qu’Hitler « soutenait le sionisme », en défendant une députée du parti Travailliste suspendue la veille pour des déclarations sur Israël.

« Ken Livingstone a été suspendu par le Parti travailliste dans l’attente d’une enquête, pour avoir nui au parti », a déclaré un porte-parole du Labour.

Les commentaires de Livingstone, un vétéran politicien d’extrême-gauche qui siège à l’exécutif national du parti Travailliste et dirige la commission de la politique internationale du parti d’opposition, avaient suscité des appels indignés, y compris de la part de nombre de ses collègues, appelant à sa suspension du parti, et ont intensifié la crise au parti Travailliste sur l’antisémitisme dans ses rangs.

Sadiq Khan, le candidat du parti Travailliste dans la campagne actuelle pour la mairie de Londres, a qualifié les remarques de Livingstone
d’ « épouvantables et inexcusables. »

Son collègue travailliste, le député John Mann, a fait face à Livingstone dans une confrontation extraordinaire par vidéo pour le qualifier
d’ « apologiste nazi », de « putain de honte », et de « raciste dégoûtant » qui réécrit l’histoire.

Mann, qui préside le Groupe parlementaire multipartite contre l’antisémitisme, a déclaré à Livingstone qu’il « devrait lire ‘Mein Kampf’ et que cela lui permettrait d’apprendre qu’Hitler était opposé à un Etat juif, car il pensait que ce serait créer une base de pouvoir juif.

« Je pense que vous n’avez plus toute votre tête, M. Livingstone », a attaqué Mann. « Qui êtes-vous en ce moment ? »

La controverse a éclaté un jour après que le leader du Parti travailliste, Jeremy Corbyn, un critique amère d’Israël qui a fait référence à des représentants du Hamas et du Hezbollah comme étant des « amis », a suspendu – à contrecœur – une députée, Naz Shah, qui avait appelé au démantèlement d’Israël et avait comparé les Israéliens à Hitler.

Le député John Mann (Crédit : Autorisation)

Le député John Mann (Crédit : Autorisation)

Livingstone a donné une interview jeudi matin dans laquelle il a tenté de défendre Shah.

Il a dit à la BBC à Londres, « Il y a eu une campagne très bien orchestrée par le lobby israélien pour salir toute personne critiquant la politique israélienne et la qualifier d’antisémite. J’ai dû supporter cela pendant 35 ans ».

« Franchement, » a également ajouté Livingstone, selon le Guardian, « il y a eu une tentative de salir Jeremy Corbyn et ses associés, le qualifiant d’antisémite, à partir du moment où il en est devenu le leader. Nous avons tout simplement le droit de critiquer ce qui est l’un des régimes les plus brutaux du fait de la façon dont les Palestiniens sont traités ».

Il a également amené Hitler dans la conversation, disant : « Rappelons-nous quand Hitler a gagné son élection en 1932, sa politique était alors que les Juifs devraient être déplacés en Israël. Il soutenait le sionisme – cela avant qu’il ne devienne fou et finisse par tuer six millions de Juifs ».

Défendant Shah, Livingstone a déclaré : « C’est une critique profonde d’Israël et de ses politiques. Ses remarques dépassaient les limites, mais elle n’est pas antisémite. Je suis dans le parti Travailliste depuis 47 ans ; je n’ai jamais entendu quelqu’un dire quoi que ce soit d’antisémite. J’ai entendu beaucoup de critiques de l’Etat d’Israël et de son abus contre des Palestiniens, mais je n’ai jamais entendu qui que ce soit dire quoi que ce soit d’antisémite. Ça dépasse complètement les limites, mais ce n’est pas antisémite ».

Ken Livingstone (Crédit photo : BBC)

Ken Livingstone (Crédit photo : BBC)

Des politiciens de tout l’échiquier politique ont attaqué Livingstone, avec un nombre croissant de députés du parti demandant qu’il en soit exclu ou suspendu.

Le Conseil des députés des Juifs britanniques a dit qu’il devrait tout simplement être exclu du parti Travailliste.

Le président du Conseil, Jonathan Arkush, a déclaré : « les commentaires de Ken Livingston étaient odieux et dépassent la honte. Ses derniers commentaires combinent révisionnisme avec déni de l’antisémitisme, alors que les preuves sont visibles aux yeux de tous. Il n’a aucun sens de la décence. Il doit maintenant être expulsé du parti Travailliste ».

Le député du parti Travailliste britannique, Wes Streeting, 33 ans, a été élu en 2015 pour représenter le district nord de Ilford (Crédit photo : autorisation)

Le député du parti Travailliste britannique, Wes Streeting, 33 ans, a été élu en 2015 pour représenter le district nord de Ilford (Crédit photo : autorisation)

Mercredi également, un autre député travailliste, Wes Streeting, a déclaré au Times of Israel dans une interview que la réponse de son parti à l’antisémitisme a été jusqu’ici « maladroite et inefficace » et que « maintenant, il y a un contrôle des médias sur l’élection de Jeremy Corbyn. C’est un peu comme soulever une pierre et voir sortir des insectes rampant ». (Jeudi, Streeting rejoint ceux qui appellent à ce que Livingstone soit « immédiatement suspendu », en disant qu’il avait des antécédents d’antisémitisme).

Luttant contre la tempête déclenchée par sa position sur Israël, Shah a présenté des excuses personnelles à la Chambre des communes pour ses propos, qu’elle a souligné avoir tenus avant de devenir députée.

Elle a promis de bâtir de meilleures relations avec les Juifs et tous les autres. « J’espère que vous me permettrez de dire que je reconnais pleinement que j’ai fait une erreur et que je m’excuse de tout mon cœur envers cette Chambre pour les mots dont j’ai fait usage avant d’en devenir membre », avait déclaré plus tôt Shah.

« J’accepte et je comprends que les mots que j’ai utilisés ont bouleversé et blessé la communauté juive et je le regrette profondément. L’antisémitisme est du racisme, point final. En tant que députée, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour établir des relations entre les Musulmans, les Juifs et les gens de différentes confessions ou n’en ayant pas ».

Mais Corbyn, après avoir initialement accepté ses excuses, l’a suspendue un peu plus tard mercredi après-midi.

David Cameron (Crédit : capture d'écran Youtube/Channel4News)

David Cameron (Crédit : capture d’écran Youtube/Channel4News)

Cameron avait trouvé « extraordinaire » que le parti Travailliste n’ait pas suspendu Shah. Le Guardian cite un assistant du Premier ministre déclarant : « Si le parti travailliste avait une once de décence, elle serait immédiatement suspendue… Jeremy Corbyn devrait avoir honte. »

Une députée travailliste Lisa Nandy, avait publiquement demandé à ce que Shah soit suspendue.

Le parti Travailliste devrait « suspendre toute personne qui fait des commentaires antisémites, conformément à notre politique, et une enquête devrait être menée », a déclaré Nandy.

Mais Corbyn avait d’abord déclaré que Shah avait « présenté des excuses complètes », qu’il avait acceptées. « Ce ne sont pas ses opinions et elle reconnaît qu’elle avait tout à fait tort de publier ces postes », a déclaré Corbyn. Son porte-parole, tout en reconnaissant que ses commentaires avaient été antisémites, a dit que la députée s’était « choquée elle-même » et ne voulait pas dire ce qu’elle avait dit, et que, donc, elle ne pouvait pas être décrite comme étant antisémite, a rapporté le Guardian.

Plus tôt mercredi, le député conservateur Sir Eric Pickles, qui est aussi envoyé spécial de la Grande-Bretagne pour les questions post-Holocauste, avait exigé que Shah soit exclue d’un groupe parlementaire qui examine la montée de l’antisémitisme au Royaume-Uni. Le seul contact que Shah devrait avoir avec le Comité spécial des affaires intérieures à la recherche sur l’antisémitisme, a déclaré Pickles, devrait être celui de témoin témoignant devant le comité.

Cet appel a été repris par la députée travailliste Kate Hoey, qui a dit que Shah devrait quitter le Comité « tout de suite. »

Mardi, Shah avait démissionné de son poste d’aide au Chancelier de l’ombre.

La députée travailliste Naz Shah a été élue en mai l'année dernière pour représenter le district ouest de Bradford (Crédit photo : Facebook)

La députée travailliste Naz Shah a été élue en mai l’année dernière pour représenter le district ouest de Bradford (Crédit photo : Facebook)

Le post Facebook de Shah a été publié lundi, bien qu’il ait initialement été mis en ligne par Shah en 2014. Il a attiré des réponses agacées des dirigeants de la communauté juive, qui ont appelé à une clarification « urgente ».

Shah, une députée de Bradford West, située dans le Yorkshire dans le nord de l’Angleterre, avait partagé un post montrant un graphique dans lequel une petite silhouette de la carte d’Israël est disposée à l’intérieur de la carte des États-Unis intitulée « Solution pour le conflit Israël-Palestine – Relocaliser Israël aux États-Unis ».

Le graphique ajoute que : « L’Amérique a bien assez de terres pour accueillir un 51e État », « le coût du transport équivaudrait à moins de 3 ans des dépenses de défense » et « les Palestiniens récupéreront leur terre et leur vie ». Il dit aussi que : « Le Moyen-Orient sera à nouveau pacifique sans ingérence étrangère » et « les prix du pétrole vont baisser, l’inflation va baisser, le monde entier sera heureux ».

Elle avait également posté un commentaire avec le hashtag #IsraelApartheid disant : « N’oubliez jamais que tout ce que Hitler a fait en Allemagne était légal ».

Shah, qui est musulmane, a ajouté au post un statut : « Problème résolu. Vous économisez 3 milliards de livres de frais bancaires que vous transférez chaque année ».

Le post a été partagé en 2014, avant que Shah ne soit été élue au Parlement britannique. Il a d’abord été publié lundi sur le site politique britannique de Guido Fawkes. Tous les posts Facebook de Shah depuis 2014 ont depuis été supprimés.

nazshah

Shah a publié un communiqué mardi, disant : « Ce post datant d’il y a deux ans a été fait avant que je sois députée. Il ne reflète pas mon point de vue et je suis désolée pour toute offense causée ».

Elle a également publié des excuses sur Twitter dans lesquelles elle a annoncé qu’elle quitterait son poste de secrétaire privée parlementaire (PPS) de John McDonnell.

Mardi également, le site de Guido Fawkes a rapporté un deuxième poste de Facebook dans lequel Shah avait comparé les Israéliens à Hitler. Plus tard, il a publié une série de ses tweets pro-Hamas.

Dans des excuses publiée par London’s Jewish News, Shah a déclaré: « Je comprends que faire référence à Israël et Hitler comme je l’ai fait est profondément offensant pour le peuple juif ce pour quoi je m’excuse. »

Mercredi, des rapports ont émergé montrant que Shah avait employé un assistant qui a posté des tweets antisémites, qualifié Israël, d’état de terreur génocidaire et blogué que les Juifs russes orthodoxes sont impliqués dans le commerce du sexe et la traite des êtres humains et que beaucoup de Juifs ultra-orthodoxes sont des clients réguliers de maisons closes.

Jeremy Corbyn vient d'être élu nouveau chef du parti d'opposition travailliste britannique, à Londres, le 12 septembre 2015. (Crédit : AFP PHOTO / BEN STANSALL)

Jeremy Corbyn vient d’être élu nouveau chef du parti d’opposition travailliste britannique, à Londres, le 12 septembre 2015. (Crédit : AFP PHOTO / BEN STANSALL)

Corbyn, qui a été élu leader du parti travailliste en septembre, a déclaré à la BBC le 11 avril que toute personne faisant des déclarations antisémites « serait automatiquement exclue du parti ».

Cette directive a été annoncée au milieu d’une intense attention des médias sur les faits et gestes du parti Travailliste suite à plusieurs incidents de discours haineux contre les Juifs. Certains critiques font remonter cela au soutien passé de Corbyn aux ennemis d’Israël, dont le Hamas et le Hezbollah.

Jonathan Arkush, le président du Conseil des députés des Juifs britanniques, a récemment déclaré que ces cas, ainsi que l’inaction perçue de Corbyn et son incapacité à prendre ses distances avec le Hamas et le Hezbollah, signifient que la plupart des Juifs britanniques se méfient du parti Travailliste.

L’AFP a contribué à cet article.

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