Dans son rôle de premier ministre, Philippe Couillard ne m’impressionne pas. Il m’apparaît distant, froid, intouchable dans sa bulle, un peu à la manière de Stephen Harper.
On raconte dans les corridors du pouvoir à Québec que Philippe Couillard dirige le gouvernement comme son collègue à Ottawa, en control freak.
Sa façon de traiter les membres de son conseil des ministres suggère que la majorité d’entre eux ont été bannis à la table des enfants. Seuls Gaétan Barrette et Martin Coiteux peuvent manger avec les grands.
Je comprends que plusieurs Québécois sont en beau fusil contre le premier ministre en raison des coupures qu’il estime nécessaires pour atteindre le déficit zéro. Il n’a jamais pris le temps de bien expliquer, en bon père de famille, pourquoi il faut faire des sacrifices maintenant pour mieux vivre plus tard.
Certains refusent l’idée même que les finances du Québec sont mal en point. Je pense notamment à Christian Bégin qui affirme ne pas croire que les coffres de l’État sont vides (parce qu’il y aurait beaucoup d’argent dans le monde) alors que nous devons payer 10 milliards $ par année en intérêts sur la dette. Une somme bien que trop réelle.
Les péquistes ne trouveront jamais la moindre qualité à un premier ministre libéral, pas plus que les amis de Québec Solidaire. Et la CAQ doit garder une distance même si elle partage certains des objectifs économiques du PLQ.
Malgré la grogne, si on se fie au sondage du weekend dernier, le PLQ récolte 37% des intentions de vote, loin en avant du PQ et de la CAQ qui stagnent à 25%. Personne ne peut affirmer que ce gouvernement n’a pas la légitimité nécessaire pour gouverner dans le cadre de notre système parlementaire.
Et comme mes amis m’entendent souvent le dire: «nous avons la classe politique que nous méritons.»
Un peuple de gueulards
Mais lorsqu’on se promène sur les réseaux sociaux, dans les commentaires sur les blogues, on fait vite connaissance avec une affreuse bête à cornes qui crache du feu avant de croquer tout crus les petits enfants, un Philippe Couillard diabolisé qui porte en lui tous les maux de la terre. Il serait un voleur, un menteur, un croche, un fourbe, un serpent, un escroc, un traître, un vendu, un salaud, un écoeurant, un suppôt de l’Arabie saoudite – il y a même des gens qui colportent l’information (fausse) qu’il porte la barbe parce qu’il est musulman – un gars qui s’en met plein les poches, qui n’aspirait au pouvoir que pour rendre les riches encore plus riches, et les pauvres plus pauvres.Alors qu’il ferait pas mal plus d’argent en tant que neuro-chirurgien.
C’est à qui trouvera l’insulte la plus acérée. Et la plus fantasque.
Traitez-moi de réactionnaire, mais on a beau ne pas aimer un premier ministre, nous devons le respect à la fonction de chef de l’État qu’il ou elle occupe. Et pour laquelle cette personne a été élue au suffrage universel, dans les règles de l’art. Le Québec n’est pas une république bananière.
Et à moins de découvrir que le ou la chef de l’État agit de manière vile et immorale, c’est un être humain comme les autres qui mérite un minimum de courtoisie.
Quand avons-nous perdu l’habitude de dire «je ne l’aime pas» ou «je ne luis fais pas confiance» ou «sa tête ne me revient pas» ou «il fait mal sa job» pour critiquer un politicien ?
Comment en sommes-nous venus à ne pouvoir exprimer notre insatisfaction que par le biais d’insultes vulgaires et d’accusations graves sans détenir la moindre preuve ? À coup de «qu’il mange d’la m…»
Oui, la classe politique actuelle déçoit. Mais quand on utilise un langage ordurier pour parler de ceux et celles qui nous représentent, nous nous enfonçons et traînons le débat avec nous, direction, fond du baril.